Dans le cadre du premier forum économique de Podor, un panel axé sur « les contributions de l’irrigation à la résilience climatique, à l’amélioration de la nutrition et à l’atténuation des conflits » a regroupé les représentants de la Société d’Aménagement et d’Exploitation des Terres du Delta du Fleuve Sénégal (SAED) dans le département, du Pôle Eau Dakar, des producteurs du cadre de concertation des ruraux (CNCR), de la compagnie sucrière sénégalaise (CSS) ainsi que de l’Agence Régionale de Développement (ARD) de Saint- Louis.
En effet, l’irrigation est un élément clé pour l’atteinte à la souveraineté alimentaire. En revanche, elle est confrontée à de multiples défis dont les conséquences entravent l’agriculture.

Le panel a ainsi permis de déterminer les enjeux de l’eau d’une manière générale et de l’irrigation en particulier, de relever les défis et limites qui l’entravent et de proposer des solutions pour atteindre la souveraineté alimentaire dans le département de Podor.
Il a également a mis en lumière les déficits d’investissement dans le domaine de l’irrigation.
Modérant la discussion, le docteur Boubacar Barry, expert en eau a d’emblée noté que « l’eau est une propriété collective, un bien culturel et historique. Sa gestion nécessite un dialogue communautaire pour permettre un développement agricole durable car elle constitue une science ».
Il a également souligné que le fleuve Sénégal est partagé par plusieurs pays dont le Sénégal, par contre le département de Podor est arrosé par quatre cours d’eau.
M. Barry a souligné que « les types d’aménagement sont obsolètes et qu’il est impératif de procéder à une innovation majeure afin d’obtenir de bons rendements avec une maitrise de l’eau. Concernant les spéculations, le docteur Barry a recommandé d’adapter les spéculations suivant les zones de cultures qui n’ont pas les mêmes spécificités de culturales. »

Les missions de Geneva Water à podor et dans la zone Nord du Sénégal

Jean Willemin Chargé de projet senior à Geneva water, un partenaire de l’initiative prospective agricole et rurale (IPAR) est revenu dans sa présentation sur les enjeux de l’eau et la paix. Il a rappelé l’Objectif de l’arrivée de Geneva water dans la zone Nord du Sénégal ainsi que la date de création en 2015 de leur plateforme qui œuvre entre autres dans la diplomatie de l’eau.
Selon lui, l’eau est une source de coopération et de dialogue mais elle peut être source de guerre. La vision de Geneva water est de prôner un dialogue pour une bonne gestion de l’eau, et de promouvoir la paix et la coopération.
Le représentant de Geneva water a indiqué que « l’eau souffre de sa fragmentation institutionnelle » car étant partout. Le rôle du projet Geneva water hub est de poser des plateformes de dialogue, testées au Sahel.
Il a expliqué que Geneva water cherche à faire de l’eau, un vecteur de paix, de voir comment l’eau peut être utiliser pour une paix durable ?
L’examen critique de tous les acteurs de l’eau permettra de sortir des recommandations pour une gestion harmonieuse de l’eau.
Dans le cadre de leurs activités au sahel dont le Sénégal, figure en bonne place la promotion de l’entreprenariat visant à réduire le chômage. A ce niveau, il préconise des réflexions au niveau local pour arriver à un consensus sur la gestion de l’eau pour la cohésion sociale.
Pour lui, l’économie de l’eau est un enjeu majeur pour la stabilité sociale. « Il n’y a aucun expert unique qui maitrise la question de l’eau » pour arriver à une harmonisation sociale. L’hydrodiplomatie est une affaire de tous.
La contribution de l’irrigation dans l’atteinte à la souveraineté alimentaire

Par rapport à la contribution de l’irrigation dans la souveraineté alimentaire, Abderrahmane Gueye de l’Agence Régionale de Developpement (ARD) a souligné la nécessité de mettre l’accent sur le transfert de compétences au niveau territorial. Dans ce sillage, il préconise une rationalisation de l’utilisation de l’eau ainsi qu’une bonne technologie.
D’après M. Gueye, les acteurs locaux doivent être responsabilisés dans la gestion de l’eau car la gestion des conflits peut avoir un effet sur la souveraineté alimentaire.
Il ajoute que la lutte contre le changement climatique est aussi un facteur clé d’atteinte de la souveraineté alimentaire. La gestion intégrée de l’eau pourrait favoriser un dialogue permanent. Des cadres de concertation sont aussi des facteurs de cohésion sociales pour une bonne politique alimentaire. Les scientifiques pourraient aussi être associés à la connaissance locale pour une mise en connexion et une harmonisation de programmes de développement local.
Le représentant de l’Agence nationale de l’Aménagement du Territoire (ANAT), M. Diarra est revenu sur le plan départemental d’aménagement de Podor qui montre la cartographie de toutes les filières de Podor,es infrastructures, l’occupation des sols.
Il est prévu des schémas communaux d’aménagements pour une bonne planification de développement local. Il a fait savoir que les visas de localisations sont initiés par l’État du Sénégal pour faciliter les délimitations de terres.
Les propositions de la Société d’Aménagement et d’Exploitation des Terres du Delta du Fleuve Sénégal (SAED) pour maitriser l’irrigation dans le département et ses environs.

Paul FAYE de la SAED de Podor a partagé des propositions allant dans le sens de la maitrise de l’irrigation de la région. Il a rappelé que la mission de la SAED est de promouvoir l’agriculture irriguée et d’assister les collectivités et les terriens qui interviennent dans l’agriculture de la vallée.
Avec quatre cours d’eau qui se situent dans le département, le challenge est de voir comment mobiliser l’eau ? La solution est d’avoir une bonne stratégie de maitrise d’eau pour un accès large. Dans ce cadre, il faut des stations de pompages et des zones de stockage d’eau pour une distribution dans les parcelles.
La SAED apporte son soutien aux mairies pour le drainage de l’eau avec des comités d’usagers qui permettent de gérer les ressources. M. Faye préconise des solutions comme la réflexion sur la solarisation dans un contexte de changement climatique. Dans le programme de la SAED, il y’a six zones tests. Ce système permettra de baisser les coûts de production . La diffusion de technologies est aussi une solution pour la compétitivité du riz local. Des variétés culturales sont testées et l’adaptions au froid et la salinité est constatée.
Il propose également d’améliorer le rythme d’aménagement et augmenter la taille des parcelles et les superficies aménagées.Les producteurs terriens doivent aussi être formés sur l’utilisation des technologies agricoles. Il a annoncé que la SAED a un programme de 10 à 15 ans destiné à la solarisation intégrale des zones de pompages.
Qu’en est-il de l’investissement dans l’irrigation ?

La question d’investissement dans l’irrigation a été également soulevée par les panélistes. Mor Talla Sall, représentant du secteur privé en l’occurrence la Compagnie Sucrière Sénégalaise (CSS) a apporté des réponses sur les déficits de l’investissement dans le département.
M. Sall a fait savoir que l’investissement dans le domaine de l’irrigation est lourd et la non sécurisation du foncier bloque les investisseurs. Il faudra ainsi faire des efforts dans la planification de l’investissement, l’aménagement et la viabilisation à Podor. La réutilisation des eaux usées pouvait aussi aider sur la disponibilité suffisante de l’eau. L’irrigation doit être rentabilisée. Il est temps de voir comment investir de façon responsable sur le foncier et sans mesures concrètes, les érosions auront des effets négatifs sur l’agriculture à Podor.

Mme Aida Djigo WANE du Pôle eau de Dakar indique que le montant de l’investissement public sur l’agriculture s’élève à 84 milliards de FCFA par an, soit 0,2% du budget national. Les entreprises familiales sont épaulées par des structures comme la SAED et autres structures de financement. L’agro-industrie est un secteur phare de l’atteinte à la souveraineté alimentaire. L’État à lui seul ne peut pas régler la question du financement agricole. Le secteur privé doit jouer un rôle essentiel. Les exploitations familiales doivent être transformées en entreprise familiale. Il faut une aussi une synergie d’actions entre le privé, l’État et les terriens pour arriver à une bonne vision en investissement agricole.
La préfecture plaide pour la mise en place d’un système de régulation de l’eau pour une exploitation optimale

M. Fodé Ndaw, l’adjoint du Préfet de Podor a pour sa part déclaré que la sécurité de l’eau est un facteur de paix et de souveraineté alimentaire. Les défis s’articulent autour de la mise en place d’un système de régulation de l’eau pour une exploitation optimale, l’économie circulaire car le recyclage est une niche d’opportunité à valoriser, une exploitation optimale de l’eau par les terriens pour diminuer les coûts d’investissement.
Il prône également une réflexion sur la mise en relation de plusieurs stratégies scientifiques et locales pour une sécurisation de l’eau car les cultures du Dieri et du Walo doivent jouer un rôle crucial pour la souveraineté alimentaire. Ainsi il faudra s’appuyer sur les leviers suivants : valorisation des eaux de surfaces et souterraines , développement des aménagement hydro-agricoles, sur un système d’irrigation économe de l’eau, la valorisation des ressources énergétiques et les innovations agricoles et l’appui scientifique.